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Conséquences de la déforestation en France

Une protection contre le changement climatique réduite

Les conséquences de la déforestation en France

Les conséquences de la déforestation en France, qui a commencé à l’âge du bronze, sont encore visibles aujourd’hui. Elles se retrouvent non seulement dans les paysages du pays, aussi dans les caractéristiques du climat de notre pays et la dynamique de réchauffement climatique qui y est associée.

  

Pour bien appréhender le rôle des forêts pour un territoire donné, comme la France métropolitaine d’aujourd’hui, il faut s’intéresser à l’histoire des défrichements et des reboisements successifs qui ont façonné les paysages que nous connaissons aujourd’hui.

 

Surtout, il est important de renverser certains paradigmes, comme l’idée que nous pouvons nous faire du lien entre végétation et climat. Par exemple, en France, le manque de végétation permanente dans certaines régions comme dans l'Ouest du pays, nous met en position de faiblesse pour affronter la violence du  changement climatique.   


Petite histoire de la forêt française

Défrichement au moyen âge
Bucherons à l'oeuvre au 11ème siècle, Tapisserie de Bayeux

Dans leur ouvrage intitulé « Histoire des forêts françaises », édité par le CNPF, Jean Marie Ballu et Georges André Morin associent les défrichements des forêts aux fluctuations de la population.  

Des temps anciens jusqu’à l’avènement de l’énergie charbon, les surfaces déboisées sont intimement proportionnelles aux chiffres de la population.

 

Les forêts d’Europe se sont constituées il y a 12000 ans, dans le prolongement du réchauffement qui a suivi la dernière glaciation. Les premiers défrichements ont commencé avec les premières sédentarisations et les cultures qui y étaient associées. La recherche de matière première bois et de combustible accompagnait ces déboisements.

 

Quand les romains envahissent la Gaule, ils trouvent un territoire déjà largement déboisé, notamment dans le sud et le sud-ouest. Les romains poursuivront ces défrichements autour des voies qu’ils construisent pour faciliter les communications. Les défrichements prendront un nouvel élan avec le travail des moines bénédictins sous Charlemagne au 9ème siècle. Puis les invasions des 9ème et 10ème siècles réduisent la population et la forêt progresse à nouveau.

 

Au 12ème et 13ème siècles les déboisements reprennent. C’est à la suite de ce mouvement, qu’en 1346, l’ordonnance de Brunoy constitue une première réglementation des coupes afin de garantir un approvisionnement à long terme du bois de chauffage et de construction. Mais son application sera aléatoire et les effets mitigés. Cependant la guerre de cent ans puis les grandes épidémies du 14ème au 16ème siècle réduisent la dynamique démographique et la forêt progresse à nouveau.

 

Et les défrichements reprennent au 16ème siècle si bien que sous Louis XIV, Colbert intervient pour protéger les forêts, avec un but principalement militaire. Il souhaitait garantir l’approvisionnement en bois pour la construction navale. Mais sous Louis XV et jusqu’à la révolution industrielle, une nouvelle érosion des forêts est constatée. Le peu qu’il en reste au 19ème siècle est sauvé par le charbon, qui se substituera peu à peu à l’énergie bois.  

 

Dans la première moitié du 19ème siècle les forêts recouvrent 7 à 8 millions d’hectares (sur le périmètre du territoire métropolitain d’aujourd’hui). Depuis la surface forestière progresse. Elle atteint 17,3 millions d’hectares en 2022, recouvrant 31% du territoire. 

 

En suivant cette histoire, on se rend compte que le milieu naturel montre rapidement des limites aux conditions d’existence d’une population. Mais au-delà de la matière et de l’énergie, les forêts contribuent à la fabrique du climat et leur absence peut entrainer des conséquences aggravantes sur le changement climatique. 

 

Les deux mille ans de déforestation en France ont laissé un pays dépouillé de 70% de ses forêts. Qui plus est, comme on le verra ci dessous, la répartition des forêts n'est pas homogène sur le territoire, ce qui constitue une situation défavorable pour affronter le changement climatique.   

Le rôle des forêts sur le climat

Lees forêts régulent le climat en protégeant le cycle de l'eau
Photo crédit Pixabay

Pendant longtemps on a cru que les climats dépendaient de facteurs liés à la géographie comme la latitude, la présence d’océans, mers, continents, reliefs… En combinant les lois de la physique à ces éléments de base, on expliquait les différents types de climats sur la planète.

 

Puis on disait : "à tel type de climat correspond tel type de végétation". Mais dans les années 1990 des chercheurs ont commencé à se demander dans quelle mesure la végétation en un lieu, ou l’absence de végétation, pouvait influer sur le climat. De nombreux programmes de recherche ont été entrepris. Les résultats parus à ce jour montrent que la végétation elle aussi, et notamment les forêts, participe à l’élaboration du climat. On sait maintenant que les forêts font aussi le climat. Ce phénomène est par ailleurs de mieux en mieux quantifié. Et ceci indépendamment de la capacité des arbres à absorber le CO2.

 

Le processus est assez simple : la forêt facilite l’infiltration de l’eau dans les sols lorsqu’il pleut. Ceux-ci peuvent alors contenir plus d’eau, eau qui sera restitué plus tard à l’atmosphère lors de la croissance des végétaux (au printemps et en été sous nos latitudes). C’est la photosynthèse, réaction chimique de base qui construit le végétal tout en rejetant de la vapeur d’eau dans l’atmosphère. On appelle ce phénomène évapotranspiration. Il a pour caractéristique d’absorber de la chaleur qui sera restituée plus loin dans l’atmosphère, en altitude, et évacuée vers l’espace (voir le bilan radiatif de la Terre).

 

Les forêts déterminent donc le maintien de l’eau dans les sols et l’évaporation. Elles favorisent les précipitations. Ceci non seulement parce que la quantité de vapeur d'eau dans l'atmosphère augmente, mais aussi parce que les forêts émettent des aérosols qui peuvent déclencher ces précipitations. La continuité forestière des océans vers l’intérieur des continents est un déterminant du niveau de précipitations en un lieu.

 

Pour ces raisons, contribution au cycle de l’eau, régulation de la température, maintien des précipitations sur les continents, les forêts participent à la régulation du climat. Dans certaines conditions, leur absence peut aller jusqu'à entrainer une désertification.

 

Les études conduites sur les déforestations, comme en Amazonie, montrent des modifications locales du climat, et notamment une baisse des précipitations, associée à une augmentation des sécheresses.

 

Les conséquences les plus importantes de la déforestation, en France ou dans le Monde sont l’atteinte à la biodiversité et au fonctionnement du cycle de l’eau. On peut ainsi générer une augmentation locale des températures de plusieurs degrés en déboisant. 

Les conséquences de la déforestation en France

L'état des forêts françaises, une répartition déséquilibrée

Des forêts qui manquent dans l'ouest du pays
Photo arienne des forêt, crédit IGN

La déforestation en France a laissé des forêts plutôt implantées sur la partie est du territoire et sur les zones montagneuses. L’exception est constituée par la forêt landaise, plantée au 19ème siècle.

 

La photo IGN ci contre illustre bien cette situation. Elle est défavorable à la résistance de notre territoire au changement climatique.

 

L'influence du manque de forêts sur le climat

Evolution des températures en France
La France se réchauffe deux fois plus vite que le reste du monde, Ribes et al 2022
Evolution prévue du niveau des nappes phréatiques
Le niveau des nappes phréatiques prévu à la baisse, BRGM

Le réchauffement climatique en France a presque atteint 2,5 degrés en 2022. La France se réchauffe deux fois plus vite que le reste du Monde, et trois fois plus vite que les océans. 

 

Les prévisions du BRGM sur les évolutions du niveau des nappes phréatiques d'ici 2050 sont très préoccupantes. Le déficit de forêts en France contribue à cette situation

Certaines région sont moins arrosées
Cumul annuel moyen des précipitations

Dans un contexte de forte augmentation des températures et de baisse des précipitations, le manque de forêts dans l’ouest du pays empêche le phénomène de pompe biotique de fonctionner. Les effets de sécheresse sont aggravés.

 

Le phénomène de couplage entre les sols et l'atmosphère devient défavorable. 

 

La carte ci-contre illustre une des conséquences de la déforestation en France depuis des siècles. Dans les grandes plaines de l’ouest et du Nord, les cumuls de précipitations sont parmi les plus faibles en France. Le manque de forêts associé aux effets de plaine est défavorable. 

 

C’est pourquoi notre projet vise à reboiser sur la partie ouest du territoire, afin de reconstituer le cycle de l’eau, favoriser l’infiltration de l’eau en période hivernale notamment et générer plus d’évapotranspiration en été pour favoriser les précipitations. 

 

C’est un projet qui cherche éliminer les conséquences de la déforestation en France depuis des siècles. Dans un contexte de changement climatique violent, le manque de massifs forestiers dans l’ouest du pays nous met dans une situation critique. 

Une forêt qui progresse en surface, mais attaquée

Progression de la forêt française, IGN
Progression de la forêt française, IGN

Le mémento de l’Inventaire Forestier National de l’IGN dresse chaque année un bilan de la forêt française.

 

Globalement la surface forestière mesurée par l’IGN progresse, de l’ordre de 60 à 80000 hectares par an.

 

Cependant la forêt est de plus en plus vulnérable aux bio agresseurs qui attaquent certaines populations d’essences comme les châtaigniers, les frênes ou les épicéas.

 

L’augmentation des fréquences et intensité des sécheresses fragilise aussi la forêt. Les surfaces détruites par des incendies ont aussi tendance à augmenter.

Terrains fragilisés, risque d'inondation, biodiversité fragilisée

Outre les conséquences climatiques le manque de forêts entraine d'autres effets négatifs comme par exemple :

  • Moindre stabilité des sols, notamment sur les terrains en pente. La végétation ralentit l'érosion et maintient les terrains sujets à l'éboulement;
  • Des sols d'une moindre qualité, qui ne se renouvellent plus avec la chute des feuilles notamment. Le manque de végétaux morts réduit aussi la vie organique;
  • La moindre capacité des sols à absorber l'eau peut favoriser le risque d'inondation. En cas de fortes pluies, l'eau sur des sols sans végétation permanente aura plus tendance à ruisseler vers les cours d'eau et favoriser les inondations.
  • Enfin les forêts abritent une abondante biodiversité, non seulement au dessus du sol, mais également dans le sol lui même. Cette biodiversité représentée par la matière organique fabrique le sol en lui même et favorise l'infiltration de l'eau.     

La déforestation en France se poursuit pour de mauvaises raisons

Conséquences d'une déforestation dans le Lubéron
Lubéron, PPV sur zone déforestée , photo IGN

Malheureusement on rencontre encore certaines opérations déboisement en France, au-delà de l’exploitation de la forêt.

 

Comme au moyen âge, c'est notre addiction à l'énergie qui en est la cause, associé à un manque de clairvoyance. 

 

Ces déboisements sont le plus souvent destinés à dégager de grandes surfaces pour y implanter des fermes photovoltaïques. La recherche de bois pour faire fonctionner des centrales de fabrication de carburant à partir de biomasse est aussi un danger pour nos forêts.

 

Alors qu’elles sont présentées comme des solutions écologiques, ces opérations sont très dommageables pour l’environnement. Elles éliminent de la biodiversité et altérent le cycle de l’eau. Elles sont à proscrire absolument.


Cet article sur les conséquences de la déforestation en France a été rédigé par Frédéric Durdux