Conférence climat, eaux et forêts, Metz octobre 2023

La nature et l'Homme face au changement climatique

Conférence organisée par la Ville de Metz et Lorraine Nature Environnement

Conférence climat, eaux et forêts à Metz avec Lorraine Nature Environnement

Cette conférence a été organisée par la Ville de Metz et Lorraine Nature Environnement. Elle fait partie d'un cycle intitulé "la nature et l'Homme face au changement climatique" qui se tient à Metz du 27 septembre au 25 octobre 2023, et s'est tenue le 18 octobre.

 

La Terre du Futur était invitée à présenter les interactions entre le climat, l'eau et les forêts. La présentation a été assurée par Frédéric Durdux.

 


Résumé de la conférence climat, eaux et forêts

Diapositives présentées

Les planches du diaporama présenté lors de la conférence de Metz peuvent être visionnées sur le carrousel ci dessous. 

Commentaires des diapositives

Je remercie chaleureusement tous les participants et toutes les participantes qui sont venus assister à cette conférence. Je remercie la Ville de Metz pour son accueil et l’association Lorraine Nature Environnement qui a organisé cet échange.

 

INTRODUCTION DU SUJET

Dans cette conférence avons parlé du climat, de l’eau et des forêts, et nous avons exploré les interactions qu’il peut y avoir entre ces éléments. Parce que ces interactions sont fondamentales pour le climat. En général quand on pense au lien entre forêts et climat, on pense à la capacité des arbres à absorber le CO2, principal gaz à effet de serre responsable du changement climatique. Mais pendant cette conférence nous n’avons pas beaucoup parlé d’émission de gaz à effet de serre. Non pas parce que ce n’est pas important, mais c’est un sujet déjà très présent dans le débat public. On en parle beaucoup, mais sans avoir pu à ce jour obtenu des résultats tangibles pour les maitriser. Mais on parle beaucoup moins du rôle du cycle de l’eau dans la régulation climatique.  Il est vrai que depuis 2022, on évoque de plus en plus les pénuries d’eau, les sécheresses en Europe mais d’un point de vue économique, pas pour le rôle de l'eau sur la régulation du climat. Donc lors de cette soirée, on parle d’eau, de vapeur d’eau de la circulation de ces éléments et du rôle de la végétation dans cette circulation.

 

LE CLIMAT

Pour commencer, il faut comprendre les évolutions environnementales dans lesquelles nous sommes entrainés. Peut-être que je vais enfoncer quelques portes ouvertes, mais il est important de s’assurer qu’elles le restent bien … Pourquoi ?

  • Parce que le changement climatique c’est grave, très grave;
  • Le changement climatique n’est pas à minimiser ou à prendre à la légère ;
  • Le changement climatique a et aura des conséquences sévères à très sévères, ce n’est pas qu’un inconfort lié à des températures élevées. C’est une menace existentielle ;
  • C’est un phénomène qui va très vite qui est très violent;
  • Donc il faut s’en occuper, l’enrayer, et il faut s’en protéger; 

Le changement du climat va avoir des répercussions sévères sur notre existence. C’est comme un gros boulet qui se dirige vers nous à pleine vitesse, et c’est à peine si nous mettons une feuille de papier entre le boulet et notre tête pour nous protéger.

 

Pour résumer les planches du diaporama que nous avons parcouru :

 

Planche 4 : Les différents scénarios de réchauffement jusqu’en 2100 représentent les différentes hypothèses du GIEC.  Il ne faut pas regarder que 2100, mais ce qu’il va se passer à plus court terme, notamment sur la décennie 2023/2040. Les politiques de protection et d’adaptation doivent envisager cette période. Nous devons anticiper nos politiques par décennie.

 

Planche 5 : on voit que le réchauffement moyen sur la planète à dépassé 1,1°. Il pourrait même dépasser 1,5° en 2023 selon les dernières estimations de l'unversité de Berkeley. Les choses vont très-très vite. Les continents se réchauffent deux fois plus vite que les océans. Le déficit d’évaporation sur les continents explique pour beaucoup cette dynamique. L’hémisphère nord se réchauffe plus vite que le sud.

 

Planche 6 : 2023 montre un réchauffement marqué, bien supérieur aux années précédentes. 

 

Planche 7 : en France le réchauffement s’est accentué depuis 1980, il a dépassé les deux degrés, et les tendances sur les dernières années montrent un emballement très préoccupant. Les régimes de précipitations changent également défavorablement, avec un peu plus de pluies en hiver (mais est-ce que cela va durer ?) et beaucoup moins au printemps et en été.

 

Planche 8 : Les anomalies de pluie sur les deux dernières années, le manque d’humidité dans les sols, les niveaux des nappes phréatiques. La situation est mauvaise.

 

Planche 9 : les tendances de température moyenne annuelle et de cumuls de pluviométrie sur Metz, qui n’échappe pas à la dynamique du changement climatique.

 

Planche 10 : le changement climatique s’abat sur une situation environnementale déjà très dégradée par les activités humaines.

 

Planche 11, les conséquences ont multiples, mais il faut s’intéresser de plus près au cycle de l’eau.

 

Planche 12, compte tenu de la violence du changement climatique en France, notre risque le plus important concerne la désertification probable des terres agricoles jusqu’ici très fertiles et productives.  Le danger concerne notre sécurité alimentaire.

 

Planche 13, L’étude qui est présentée a cherché à déterminer les dates des points de ruptures pour lesquels certaines cultures (riz, soja, blé, maïs) ne seraient plus possibles en fonction des scénarios du changement climatique. Pour la France les cultures du maïs et du soja pourraient devenir impossibles à l’horizon 2035, et le blé 10 ans plus tard. Ces données sont basés sur le scénario de changement climatique RCP8.5

 

Planche 14 : L’EAU

Dans la lutte contre le changement climatique, on parle beaucoup des gaz à effet de serre, mais pas assez de l’eau, ou du moins de la contribution de l’eau sous ses trois formes, solide, liquide gazeuse à la régulation du climat. L’eau, et surtout ses changements d‘état et sa circulation ont une importance capitale dans la régulation du climat. Si on altère ou interrompt le cycle de l’eau, on altère le climat, et ce de façon adverse.

 

Planche 15 : l’intérêt de l’eau pour le climat c’est son aptitude à circuler dans l’atmosphère sous ses trois états glace, liquide et vapeur, et les échanges de chaleur latente qui se produisent lors des changements d’état.

 

Planche 16 : le cycle de l’eau. Evaporation, précipitations, ruissellement de surface versus infiltration dans les sols.

 

Planche 17 : le bilan radiatif de la terre présenté en pourcentage des 340W / m2 reçus en haut de l’atmosphère. 51% du rayonnement solaire parvient jusqu’au sol, et cette énergie reçue doit être évacuée pour assurer l’équilibre thermique du globe. 7% de l’énergie incidente sur le globe est évacuée du sol sous forme convective, par l’air qui circule à la surface, s’y réchauffe et repart ailleurs dans l’atmosphère. La part d’énergie évacuée par le rayonnement infra rouge représente 21% de l’énergie incidente reçue sur le globe. C’est cette part qui est légèrement altérée par l’augmentation des gaz à effet de serre, notamment le CO2. Ce déséquilibre a déclenché le changement climatique que l’on connait. Et il y a la part, (26% du rayonnement incident) qui est évacuée sous forme de chaleur latente par l’évaporation de l’eau à la surface du globe. C’est cette part qui explique la différence de réchauffement entre les océans et les continents, car ces derniers ont moins d’eau à évaporer. Et si par les aménagements de territoire, on en vient à altérer cette capacité d’évaporation, on altère la capacité l’eau à réguler le climat localement.

 

Planche 18 : il est fondamental pour réguler le climat de protéger le cycle de l’eau.

 

Planche 19 : LES FORETS

Il y a une quarantaine d’année, dans les années 80, lorsque j’ai eu mes premiers cours de météorologie, climatologie, circulation atmosphérique, on avait une vue assez thermique et géographique de la constitution des climats. On parlait d’opposition continent – océan, de latitude, de relief, de Coriolis, et en brassant tous ces ingrédients avec les règles de la physique on décrivait la climatologie. Et on disait tel climat donne telle végétation. Mais depuis les choses ont évolué et on se demande de plus en plus dans quelle proportion la relation inverse ne serait pas aussi vraie. Les chercheurs se sont mis en action pour déterminer dans quelle mesure la végétation ne ferait pas elle aussi le climat. Depuis une quinzaine d’années, le nombre d’études qui sont publiées dans ce sens se multiplient : la végétation, ou l’absence de végétation contribue bien à faire le climat. La relation est donc à double sens. En agissant sur la végétation, on agit sur le climat. Pourquoi la végétation influerait elle le climat ? Tout simplement parce que la végétation fait circuler l’eau entre les sols et l’atmosphère. Une bonne végétation comme une forêt facilite l’infiltration de l’eau dans les sols et limite le ruissellement, et va ensuite générer en temps différé de l’évapotranspiration pendant le cycle de croissance du végétal. Cette évaporation va contribuer à tempérer l’atmosphère et recharger en eau cette même atmosphère pour générer des pluies ici et ailleurs.

 

Planche 20 : Quelques exemples d’études qui montrent que la végétation fait aussi le climat, que l’on résume plus loin.

 

Planche 21 : résumé des travaux d’Aurélien Bansept sur la quantité des eaux dans les sols : plus un sol est végétalisé de façon permanente, plus il est capable de faire infiltrer l’eau dans les sols. L’artificialisation de sols ne concerne pas que les parkings de supermarchés en zone urbaine, la capacité des sols à laisser l’eau s’infiltrer dépend fortement de leur usage.  Ainsi entre un parking de supermarché, sans doute le degré 100 d’artificialisation et une forêt plantée d’espèces diverses et que l’on laisse tranquille, qui serait un très faible degré d’artificialisation, il y a un nuancier de situations qui passe par les sols cultivés, les prairies, l’agroforesterie et qui représente des degrés d’artificialisation décroissants.

 

Planche 22 : même information que la planche 21, sous forme de tableau, la ligne du bas constitue une bonne synthèse qui permet d’avoir des ordres de grandeurs. Les forêts de feuillus permettent une infiltration 50% supérieure aux forêts de résineux.

 

Planche 23 : comparaison des effets de ruissellement en fonction de types d’occupation du sol. Logiquement inverse à la capacité d’absorption.

 

Planche 24 : La capacité d’évapotranspiration est supérieure pour les forêts.

 

Planche 25 : synthèse de l’étude de Anastassia Makarieva et Victor Gorshkov sur l’effet des forêts sur les précipitations sur les continents. Les forêts favorisent les pluies par l’évapotranspiration, la surface « rugueuse » du couvert forestier ou encore la dispersion de particules, comme les pollens ou les terpènes qui favorisent l’agglomération des gouttelettes d’eau dans les nuages. Une deuxième dimension de cette étude concerne la pompe biotique, phénomène de création d’une circulation atmosphérique des océans vers l’intérieur des continents par les forêts, qui créent des dépressions en altitude lors des précipitations, et qui assurent le transfert de la masse d’air de l’océan vers l’intérieur des continents, emportant avec elle une humidité supplémentaire. Rompre le phénomène de pompe biotique en déforestant peut conduire à des sécheresses ou la désertification des continents.

 

Planche 26 : Cette étude d’observation menée pendant une vingtaine d’année de 2000 à 2018 sur les forêts de Sologne et des Landes a pu montrer que celles-ci favorisent la génération de nuages, notamment en été. Cette nébulosité plus importante qu’au-dessus des zones agricoles avoisinantes permet de modérer les températures en surface. Après la tempête Klaus de 2009, évènement inattendu qui a abattu de nombreux arbres de la forêts des Landes, la nébulosité a été moindre en été, confortant ainsi les résultats de l'étude.

 

Planche 27 : cette étude de l’observation de la circulation atmosphérique a pu montrer que l’eau des précipitations sur les continents provenait à 40% de l’évaporation des continents (alors que ceux-ci ne représentent que 30% de la surface du globe), et qu’ils contiennent moins d’eau en surface que les océans. Ceci indique une forte provenance locale de l’eau de pluie sur les continents. Par ailleurs 57% de l’eau évaporée par les continents retourne sous forme de précipitations sur les continents.

 

Planche 28 : étude d’observation de l’effet des déforestations des forêts tropicales, indiquant des baisses des précipitations suivant déforestation. Ces données ont été utilisées pour modéliser l’impact des déforestations suivant différents scénarios de changement climatique sur les décennies à venir.

 

Planche 29 : synthèse d’une étude de simulation de l’impact d’une reforestation en Europe de 20% du territoire conjointe au scénario de réchauffement RCP4.5. Dans la plupart des régions d’Europe, cette reforestation permettrait de compenser la baisse des précipitations attendue sur ce même scénario.

 

Planche 30 : la photo réalisée par l’IGN permet de bien visualiser les massifs forestiers en France (tâches en vert foncé). Cela permet de visualiser leur répartition sur le territoire : les forêts sont plutôt concentrées sur les massifs montagneux, dans l’est du pays, le Massif Central, les Pyrénées et dans les Landes. Tout le secteur Ouest Nord-Ouest est peu recouvert de forêts : Laurageais, Est du Bassin Aquitain, Gâtine, Bassin Parisien, Plateau Picard et Flandre.

 

Planche 31 : on a mis en regard les cartes représentant les massifs forestiers (à gauche), les densités de haies (à droite) et les cumuls annuels de pluviométrie. Les zones à moindre pluviométrie sont les plaines, qui ne peuvent bénéficier des effets orographiques des montagnes et collines qui accentuent les précipitations, mais aussi les zones agricoles les moins couvertes de massifs forestiers.

 

EN SYNTHESE

Ce qu’il faut retenir :

  • Le changement climatique, ça va vite, c’est violent et ça va faire mal.
  • Il n’y a pas une relation à sens unique dans laquelle le climat fait la végétation : la végétation, dont les forêts, font largement le climat ;
  • L’artificialisation des sols, ce n’est pas que la bétonisation en milieu urbain, cela concerne aussi les zones rurales dans lesquelles les cultures ne favorisent pas l’infiltration de l’eau dans les sols.
  • Nous avons rompu une partie du cycle de l’eau en France avec l’ouest du territoire très déboisé. Il est d’une importance vitale de reboiser et revégétaliser de façon permanente.
  • La forêt souffre, mais il ne faut pas avoir qu’une posture défensive sur la forêt : il faut être offensif et favoriser des reboisements, même en France. C’est fondamental pour permettre aux eaux de pluie de s’infiltrer dans les sols pour les végétaux, assurer nos besoins en eau et générer une évapotranspiration capable d’atténuer les effets du changement climatique.
  • Nous avons besoin de régénérer la politique de la forêt en France, c’est une question d’intérêt général et national.

La synthèse de la conférence climat, eaux et forêts à Metz a été rédigée par Frédéric Durdux